Question écrite de Mme Dominique Tilmans
Question :
Les prix alimentaires mondiaux ont augmenté de façon constante au cours des dernières années. L’indice de la Banque mondiale des prix alimentaires a augmenté de 15 % entre octobre 2010 et janvier 2011 et est seulement à 3 % en-dessous de son pic de 2008. La hausse des prix alimentaires a affecté les denrées de base comme le blé, le maïs, le sucre, les huiles comestibles, et le riz. Cette situation est aggravée par une population mondiale croissante, qui fait peser une pression supplémentaire sur la production agricole, ainsi que par le changement climatique, qui conduit à des sécheresses ou à des inondations dans différentes parties du monde.
L’augmentation des prix alimentaires est une priorité pour le G20. Dans le communiqué de la dernière réunion du G20 en février 2011, le groupe a recommandé un investissement à long terme dans le secteur agricole des pays en développement. Les économistes de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (OAA-FAO) ont également souligné la nécessité d’investissements du secteur public et privé afin d’établir les conditions essentielles pour la croissance de la productivité agricole et pour enrayer le déclin des flux d’aide à l’agriculture.
L’OAA-FAO a récemment mis à jour son " Guide pour des actions politiques et programmatiques au niveau des pays pour lutter contre l’augmentation des prix alimentaires ", et organise des séminaires visant à sensibiliser le public aux diverses options politiques et spécifiques à chaque pays pour répondre à la hausse des prix alimentaires en Afrique, en Asie et dans le Pacifique, en Asie centrale, en Europe, en Amérique latine et au Proche-Orient.
La Banque mondiale a pris diverses mesures pour atténuer les conséquences négatives de la hausse des prix alimentaires sur les pays les plus pauvres, y compris la poursuite des investissements dans le Global Food Crisis Response Program (GFRP) à partir de septembre 2010 des projets GFRP s’élevaient à une valeur de 1,24 milliards de dollars américains dans trente-cinq pays. Malgré le fait que la Banque mondiale s’emploie également à aider les pays à développer des produits de gestion des risques pour accroître la capacité de répondre aux futures augmentations des prix, la Banque continue de promouvoir une approche axée sur le marché afin de stabiliser les prix alimentaires, alors que la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) voit plus de marge pour une gestion internationale des marchés des produits alimentaires, y compris les " mesures fiscales visant à réduire la spéculation sur les marchés mondiaux des matières premières ", " des mécanismes innovants de stabilisation des prix " et le " financement d’urgence pour protéger les pays pauvres lors des chocs des prix des produits de base ".
Mes questions sont donc les suivantes :
1) Quelle sera l’approche de ce gouvernement pour lutter contre la hausse des prix des denrées alimentaires ?
2) Quelles politiques seront menées, en coopération avec les institutions financières internationales, pour encourager les investissements dans l’agriculture afin de combattre l’insécurité alimentaire chronique, en particulier dans les pays les moins avancés ?
Réponse :
En réponse à la question posée par l’honorable membre, je peux lui communiquer les éléments suivants :
1) Le secteur de l’agriculture et de la sécurité alimentaire est, en accord avec la loi de 1999, une des principales priorités de la coopération belge. La Belgique a en effet pris en 2008, lors de la dernière crise alimentaire, l’engagement fort d’augmenter la part de l’agriculture dans son Aide publique au développement à 10% en 2010 et 15% en 2015. Cela se traduit par une augmentation du nombre de pays partenaires où l’agriculture est retenue comme secteur prioritaire (actuellement 11 sur 18), ainsi que de l’enveloppe globale de ces programmes. Par ailleurs, nos contributions aux agences internationales spécialisées en matière de sécurité alimentaire ont également connu une hausse considérable. Pour 2011, le budget prévu pour l’aide alimentaire, qui s’opère essentiellement par l’intermédiaire des organisations internationales (Programme Alimentaire Mondial, FAO, UNRWA), s’élève à 35,5 millions EUR. Ceci représente un doublement du budget par rapport à 2006 (17 millions). La contribution belge pour le Fonds International de Développement Agricole (FIDA) a plus que doublé et s’élève à 7 millions EUR par an pour la dernière provision financière (2010-2012). La contribution de la coopération belge à la FAO s’élève à plus de 15 millions EUR par an, ce qui fait de la Belgique le 10ème bailleur toutes contributions confondues. La contribution belge au CGIAR, en charge de recherche agronomique, est également en croissance considérable et s’élève à 9,4 millions EUR par an, budget qui a plus que doublé depuis 2005.
Afin d’augmenter l’efficacité de son aide et de développer les synergies entre les différents canaux d’intervention, la coopération belge a développé une nouvelle note stratégique pour le secteur de l’agriculture et de la sécurité alimentaire.
Cette note concentre l’action de la coopération belge sur le soutien à l’agriculture familiale durable afin d’améliorer la sécurité alimentaire et de contribuer à une croissance économique durable et créatrice d’emplois décents en milieu rural. Les interventions sont mises en œuvre dans le cadre de trois grands types d’approches adaptés à la diversité des contextes locaux : 1) l’approche de développement économique local ; 2) l’approche filière et 3) l’approche sécurité alimentaire et assistance alimentaire.
Quatre priorités ont été retenues dans ce contexte : 1) Production agricole : amélioration et sécurisation de la production et de la productivité agricole dans une perspective de développement durable ; 2) Commercialisation de la production : amélioration de la valorisation agricole et de l’accès aux marchés ; 3) Gouvernance du secteur agricole : renforcement de l´Etat dans ses rôles de coordination, de facilitation et de régulation et renforcement de la société civile et des organisations paysannes ; 4) Les femmes rurales : empowerment individuel et collectif des femmes rurales.
La coopération belge a également un rôle direct à jouer en matière de lutte contre la volatilité des prix au niveau local. En effet, la nouvelle note stratégique de la coopération belge pour le secteur de l’agriculture et de la sécurité alimentaire reconnaît l’importance de cette question et stipule explicitement que « La lutte contre la volatilité excessive des prix et pour une relative stabilité dans l’approvisionnement constitue une précondition essentielle pour la stabilité de la sécurité alimentaire et de l’économie rurale locale. Les crises alimentaires locales, même ponctuelles, ont des effets néfastes prolongés qui peuvent plonger les économies rurales dans des pièges faim-pauvreté chroniques. Le développement d’infrastructures locales de stockage de produits alimentaires de base, éventuellement couplé d’un système de crédit de type warrantage, permet d’assurer un approvisionnement plus stable et ainsi de limiter la volatilité locale des prix et l’émergence de situations de crise locales. «
Parallèlement à la mise en œuvre de sa stratégie nationale, il est évident que la Belgique contribuera, dans la mesure de ses capacités, à la réalisation des engagements pris au niveau international, entre autres, ceux du Comité de la sécurité alimentaire dont la Belgique occupe actuellement la vice-présidence.
2) Dans le cadre de la coopération avec les institutions financières internationales, la Belgique contribue de manière substantielle et régulière aux reconstitutions des ressources de l’Association Internationale de Développement (Banque Mondiale) et des Fonds Africains et Asiatiques de Développement. Ces organisations ont tous l’agriculture comme secteur prioritaire de leur intervention. En plus de ces contributions obligatoires, la Belgique finance auprès des institutions de Bretton Woods des programmes financés sur la base de contributions volontaires. Ces programmes cadrent dans un cadre de coopération, conclu pour la période 2008-2011, qui comprend trois domaines d’intervention: (i) la lutte contre la pauvreté (ii) le renforcement de la gestion macro-économique (iii) la promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption; le volet agriculture n’y fait l’objet d’aucune intervention.
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