Question écrite de Monsieur Denis Ducarme
Question :
A l’occasion de la Journée internationale de l’alphabétisation le 8 septembre 2010, le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a rappelé qu’apprendre à lire et à écrire permet aux femmes de renforcer leur "autonomie économique" et leur "engagement dans la vie sociale, politique et culturelle de leur pays". Les petites filles représentent encore plus de la moitié des 67,4 millions d’enfants privés d’école dans le monde, tandis que les deux tiers des 796 millions d’adultes analphabètes sont des femmes.
1. L’ONU avait lancé "La Décennie des Nations Unies pour l’alphabétisation", qui va de 2003 à 2012.
Quel bilan peut-on déjà tirer de cette initiative?
2. La liberté des femmes est une des pierres angulaires de la coopération belge.
Quelle est l’implication de la Belgique dans les programmes d’alphabétisation des femmes dans les pays en voie de développement?
Réponse :
En réponse à la question posée par l’honorable membre, je souhaiterais lui faire part des éléments suivants.
Le rapport annuel sur “l’Enseignement pour Tous” de l’UNESCO évoque les chiffres que vous citez: au niveau mondial, le degré d’alphabétisation augmente, mais le nombre d’analphabètes reste très élevé, à savoir 16% de la population mondiale adulte.
Ces chiffres doivent être interprétés soigneusement. Apparemment, la moitié de ces analphabètes vivent dans 4 pays: l’Inde, la Chine, le Bangladesh et le Pakistan. Et dans les pays « développés », un pourcentage des adultes reste également analphabète.
La « Décennie pour l’Alphabétisation », proclamée par les Nations Unies, n’atteint pas le résultat présupposé. Vraisemblablement, la volonté politique manque pour donner une haute priorité à l’alphabétisation. L’investissement est aussi très grand, même s’il est rentable au niveau économique et social. Heureusement, il y a quelques pays qui investissent effectivement dans l’alphabétisation et qui peuvent donc proposer des beaux chiffres, comme le Brésil, l’Inde et l’Iran.
Dans la coopération fédérale belge au développement, l’égalité des sexes et l’empowerment de la femme sont des thèmes transversaux. Ceci veut dire que chaque programme, chaque projet, est examiné sur l’aspect du genre, et ce depuis 1993 sous surveillance de la Commission Femmes et développement.
Je ne peux donner des chiffres spécifiques pour les programmes d’alphabétisation pour les femmes. Presque chaque projet avec un micro-financement va de pair avec une alphabétisation fonctionnelle, tout comme chaque projet pour des activités engendrant des revenus. La coopération bilatérale directe travaille dans la niche de l’enseignement professionnel formel et informel. Il est évident qu’au sein de cet enseignement professionnel informel, une deuxième chance est offerte afin d’exercer le droit universel aux compétences de base, comme la lecture, l’écriture et le calcul.
Je peux donner plusieurs exemples de projets et de programmes avec un volet alphabétisation, mais un bel exemple est le projet bilatéral qui est mis en œuvre par la CTB “Augmentation des Revenus des Femmes dans la Région de Dosso”, au sud-ouest du Niger. Ce projet veut améliorer la situation socio-économique des femmes par les microcrédits et les investissements. On a constaté que beaucoup de ces femmes étaient illettrées. Ne pas savoir lire ou écrire a bien sûr des conséquences sur la bonne gestion d’un crédit, mais empêche aussi de pouvoir influencer des processus de décision, comme par la participation aux conseils de village. Après une étude à grande échelle, à laquelle plus de 5000 femmes ont participé, une campagne d’alphabétisation a été entamée, en collaboration avec le Ministère de la Promotion de la Femme au Niger. Les résultats étaient très encourageants: seulement 8% des élèves ont décroché, 72% ont appris à écrire, à tenir une caisse, à calculer les bénéfices. Ces centres d’alphabétisation continuent à travailler de manière autonome.