Question de Mme Christiane Vienne
Question
Monsieur le ministre, ma question a été rédigée il y a quelques semaines et, entre-temps, l’actualité fait que le Sommet européen dont il est fait mention est en cours. Je comprendrais que vous ayez un devoir de réserve à observer. Je vous serais néanmoins reconnaissante de me donner quelques informations.
L’idée centrale du plan « Connecting Europe », présenté par la Commission, était de créer un système d’euro-obligations ciblé sur des projets d’infrastructure. La Banque européenne d’investissement (BEI) serait étroitement associée à ce projet.
Monsieur le ministre, quels seraient les détails de la mise en œuvre de ces project bonds? À partir de quand et selon quelles modalités entreraient-ils en vigueur?
Quel contrôle serait-il exercé par l’Union et les États membres sur le type de travaux à financer? Puisqu’on parle de project bonds et non d’eurobonds, pouvez-vous me dire où en est le projet des eurobonds? La mise en place des project bonds pourra-t-elle se faire en parallèle de celle des eurobonds?
Réponse
Monsieur le président, cette question se trouve en plein dans l’actualité. Ce matin, nous avons eu une réunion du gouvernement restreint pour préparer la continuité du Conseil européen qui a lieu ce soir.
Bien évidemment, la Belgique a soutenu un certain nombre d’amendements au texte du Conseil européen de dimanche qui visaient, d’une part, les eurobonds et, d’autre part, les project bonds qui, il est vrai, n’ont rien à voir les uns avec les autres. En effet, les project bonds visent à attirer des investissements privés afin de financer des projets dans le domaine des infrastructures et, plus spécifiquement, l’initiative « Connecting Europe« . D’après les explications fournies récemment par la Commission, les project bonds, sorte d’emprunts obligataires, sont liés à des projets spécifiques et doivent permettre le partage des risques entre différents intervenants. L’intérêt de cette initiative est évidemment l’effet de levier qu’elle doit provoquer.
S’agissant des modalités de mise en œuvre, la Commission européenne vient de publier deux communications sur le sujet: l’une reprend les règles communes applicables aux instruments financiers, l’autre fixe le cadre réglementaire spécifique aux project bonds. La Commission propose d’ailleurs une phase pilote d’ici fin 2013 durant laquelle elle travaillera de concert avec la Banque européenne d’investissement, puisque cette dernière pilotera le projet en apportant son expertise, tant sur la nature des projets à financer que sur la viabilité financière de ces projets. Une fois la phase pilote terminée, la Commission fera une évaluation de la mise en place des project bonds et de la viabilité de l’initiative. Suivra ensuite la phase opérationnelle à partir de 2014.
Pour le détail du contrôle de l’Union, je ne peux évidemment que vous renvoyer à ces deux communications. Celles-ci seront d’ailleurs suivies de propositions législatives concrètes. Les institutions européennes devront encore analyser dans le détail les modalités concrètes et la faisabilité de l’initiative project bonds. La Belgique estime que cette initiative est porteuse de croissance, de création d’emplois et d’innovation. Elle suivra donc de près ce dossier afin de s’assurer que ces instruments remplissent les objectifs qui leur sont assignés.
À titre personnel, je dois vous dire que les project bonds constituent un sujet qui me plaît beaucoup. Toutefois, j’ai le sentiment qu’ils ne plaisent pas à beaucoup de pays en Europe car les amendements belges introduits ce week-end n’ont pas été retenus dans les considérations des conclusions finales du Sommet de dimanche au volet Renforcement de l’intégration européenne économique. Autrement dit, une majorité d’États ne souhaitent pas prendre en considération les project bonds de la Commission dans leurs conclusions. C’est éclairant sur ce qu’il en adviendra dans le futur.
Les project bonds ne sont évidemment pas liés aux eurobonds, malgré une appellation similaire. En effet, si les uns visent à financer des projets spécifiques, les autres sont une mutualisation de l’émission d’obligations au niveau de la zone euro. Leur mise en place peut être parallèle, c’est possible mais en tout cas pas nécessaire, les uns n’étant pas liés aux autres.
S’agissant des eurobonds, le projet en est encore à ses balbutiements, puisque ce projet se heurte aux réticences de plusieurs États membres, qui ont plus facile que d’autres à financer leur dette et qui n’ont pas envie de mutualiser la leur avec celle des États membres qui ont des difficultés à la financer.
La Commission devrait toutefois publier cet automne une série d’options visant à mutualiser les emprunts obligataires éventuellement sous une autre dénomination: les stability bonds. C’est la nouveauté de la semaine, qui vient s’ajouter aux projets précédents.
Voilà pour les questions que vous me posiez, avec en filigrane une difficulté de s’entendre sur l’un comme sur l’autre au niveau du Conseil européen.