Olivier Chastel est président du MR. Il y a dix ans, il a participé aux révélations des « affaires » à Charleroi. Il était alors conseiller communal dans l’opposition. Le 5 septembre 2005, il présente à la presse un document accablant rédigé par les inspecteurs de la Société Wallonne du Logement. Il dénonce la mauvaise gestion constatée à La Carolo, la société de logements sociaux de Charleroi. C’est le début des Affaires.
Olivier Chastel vous étiez conseiller communal dans l’opposition à l’époque. Ce rapport, vous l’avez sorti en septembre, mais vous l’aviez déjà en mains depuis plusieurs mois ?
En tout cas, depuis plusieurs semaines, et, effectivement à la lecture et à la relecture de ce rapport, je me doutais qu’il y avait dans ces nombreuses pages un certain nombre d’éléments de dysfonctionnements qui méritaient qu’on les mette sur la place publique pour que les choses changent.
Manifestement, on n’en faisait rien à la Société Wallonne du Logement. La Société de Logement Social concernée n’était pas au courant, manifestement, – en tout cas son Conseil d’Administration – de la teneur de ce rapport d’audit, je tiens à le signaler. D’ailleurs, vous le savez bien, c’était le rapport du deuxième suivi d’audit. Autrement dit, il y avait eu un rapport d’audit. Un premier rapport de suivi. C’était le deuxième rapport de suivi, ce qui me faisait dire que les deux premiers documents n’avaient pas été utilisés.
Et ça, vous n’y aviez pas accès ?
Non, je ne le connaissais pas. Je n’avais eu que ce document-là. Et donc, il y a dix ans, le 5 septembre 2005, après avoir pris quelques contacts, j’ai dévoilé la teneur de ce rapport sans savoir que ça allait créer cet emballement médiatique et judiciaire. Parce que moi je faisais de l’opposition à Charleroi depuis quelques années et j’avais beau, effectivement, essayer de jouer mon rôle dans l’opposition, cela n’avait pas beaucoup d’écho dans la presse en général à l’époque.
C’était difficile, l’opposition MR comme Ecolo n’avait pas accès à l’information ?
Majorité absolue, chape de plomb, peu d’informations, peu de considération, je le dis, c’était très difficile. Et je dois même avouer qu’en mon for intérieur, quand j’ai sorti le rapport, je n’étais pas tout à fait sûr que ça allait avoir beaucoup d’impact, puisque, jusque-là, ce que l’opposition racontait, peu s’en préoccupaient. Heureusement qu’à l’époque l’un ou l’autre média a pris ce rapport à bras le corps.
J’ai une anecdote extraordinaire parce que d’autres, à l’inverse, ne se sont intéressés à ce dossier que quand j’ai été moi-même traîné au tribunal pour avoir diffusé un document qui aurait dû être gardé » confidentiel « . C’est dire si c’était assez extraordinaire à l’époque et si ça bousculait les codes politico-médiatico-judiciaires.
Ca bousculait les codes et d’ailleurs, au début, beaucoup de Carolos vous en ont voulu. Vous vous faisiez parfois insulter en rue ?
Je dois avouer avoir revu hier des images, dix ans plus tard, du Conseil Communal de Charleroi qui suit cette révélation. Je rentre dans une salle où on avait rameuté 200 à 300 personnes qui m’ont hué lors de mon entrée dans la salle du Conseil Communal. C’est assez extraordinaire parce que ce jour-là, je me suis dit » eh bien à Charleroi, il faudra un peu de temps pour que les choses changent, que les mentalités évoluent « .
Nous sommes dix ans plus tard. Comment voyez-vous l’évolution de la ville ? Il y a eu tellement de soubresauts, par exemple cette majorité absolue qui s’est ouverte au MR, au CDH, vous y avez même participé. Comment avez-vous vécu toute cette évolution chaotique?
Il faut dire que dans l’ombre des affaires, la ville de Charleroi a été paralysée longtemps. Et donc, on est arrivé à un constat de nécessité de reconstruction de cette ville à tous les niveaux, de reconstruction physique, mais aussi de reconstruction au niveau de l’administration. On s’y emploie depuis. Et je trouve que les règles sont maintenant en place, notamment des règles de marchés publics, de fonctionnements. Plus rien ne fonctionne comme ça fonctionnait avant.
Et j’ose d’ailleurs dire, parce que peu l’ont dit à l’époque, à Charleroi on a révolutionné les pratiques administratives. Je suis sûr que dans beaucoup d’autres communes on a revu ces pratiques à la lumière de ce qui s’est passé à Charleroi parce que on a sans doute découvert qu’il y avait moyen de parfaire les pratiques administratives, aussi, ailleurs.